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Titus n'aimait pas Bérénice – Nathalie AZOULAI

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POL, 20 août 2015, 320 pages

Présentation de l’éditeur :

Quand on parle d’amour en France, Racine arrive toujours dans la conversation, à un moment ou à un autre, surtout quand il est question de chagrin, d’abandon. On ne cite pas Corneille, on cite Racine. Les gens déclament ses vers même sans les comprendre pour vous signifier une empathie, une émotion commune, une langue qui vous rapproche. Racine, c’est à la fois le patrimoine, mais quand on l’écoute bien, quand on s’y penche, c’est aussi du mystère, beaucoup de mystère. Autour de ce marbre classique et blanc, des ombres rôdent.

Alors Nathalie Azoulai a eu envie d’aller y voir de plus près. Elle a imaginé un chagrin d’amour contemporain, Titus et Bérénice aujourd’hui, avec une Bérénice quittée, abandonnée, qui cherche à adoucir sa peine en remontant à la source, la Bérénice de Racine, et au-delà, Racine lui-même, sa vie, ses contradictions, sa langue. La Bérénice de Nathalie Azoulai veut comprendre comment un homme de sa condition, dans son siècle, coincé entre Port-Royal et Versailles, entre le rigorisme janséniste et le faste de Louis XIV, a réussi à écrire des vers aussi justes et puissants sur la passion amoureuse, principalement du point de vue féminin. En un mot, elle ne cesse de se demander comment un homme comme lui peut avoir écrit des choses comme ça.

C’est l’intention de ce roman où l’auteur a tout de même pris certaines libertés avec l’exactitude historique et biographique pour pouvoir raconter une histoire qui n’existe nulle part déjà consignée, à savoir celle d’une langue, d’un imaginaire, d’une topographie intime. Il ne reste que peu d’écrits de Racine, quelques lettres à son fils, à Boileau mais rien qui relate ses tiraillements intimes. On dit que le reste a été brûlé. Ce roman passe certes par les faits et les dates mais ce ne sont que des portes, comme dans un slalom, entre lesquelles, on glane, on imagine, on écrit et qu’on bouscule sans pénalités.

Mon avis :

De Racine, je ne connais que les rares pièces que j’ai lu à la fac. Je me rappelle d’une langue exigeante et de tragédies antiques.

Outre le fait que l’auteure nous parle d’une rupture amoureuse qui ne m’a pas passionnée (mais heureusement, elle ne dure que 3 chapitres), ce qui m’a surtout intéressée, c’est la vie de Jean depuis son enfance jusqu’à sa mort.

De Port-Royal, je ne connaissais pas grand chose. J’ai ainsi découvert la philosophie janséniste qui prend vie dans des murs humides au milieu de moniales recluses.

Jean, durant son enfance et une bonne partie de son adolescence, accumule du matériel linguistique pour ses futurs écrits, voulant créer une langue pure pour le Roi Soleil. Sans oublier l’insatiable défricheur des sentiments humains, capable de les restituer dans un genre ultra codé. 

Roi dont il se sent proche, n’ayant qu’un an de différence.

Sans oublier le conflit avec Corneille, qui ne respect pas la règle des trois unités.

Ce qui m’a étonné, en revanche, c’est la réapparition du personnage de Didon, figure féminine qui obsède l’auteur. Alors pourquoi parler de Bérénice dans le titre ?….

L’auteure nous donne à voir un personnage pétrie de contradictions : à la fois attiré par les fastes de Versailles, mais retournant inlassablement à Port-Royal.

Le tout servi par une écriture exigeante, comme pour rendre hommage à celui qui a si bien su ciselé la notre il y a 4 siècles.

L’image que je retiendrai :

Celle des nombreuses filles de Jean, dont l’aînée veut entrer au couvent à Port-Royal, mais son père le lui refuse à cause de son allégeance au Roi.

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