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Hérétiques – Léonardo PADURA

heretiques

Points, 21 janvier 2016, 715 pages

Présentation de l’éditeur :

En 1939, le S.S. Saint-Louis, transportant quelque 900 juifs qui avaient réussi à fuir l’Allemagne, resta plusieurs jours ancré au large du port de La Havane à attendre l’autorisation de débarquer ses passagers. Le jeune Daniel Kaminsky et son oncle avaient attendu sur le quai l’arrivée de leur famille, sûrs que le trésor qu’ils transportaient convaincrait les fonctionnaires chargés de les contrôler. Il s’agissait d’une petite toile de Rembrandt qui se transmettait dans la famille depuis le XVIIe siècle. Mais le plan échoua et le navire remporta vers l’Allemagne tout espoir de retrouvailles. 

Des années plus tard, en 2007, le tableau est mis aux enchères à Londres et le fils de Daniel Kaminsky se rend à Cuba pour savoir ce qui s’y était passé concernant sa famille et le tableau. Il réussit à convaincre le détective Mario Conde de l’aider. Celui-ci, reconverti dans le commerce des livres anciens, découvre que cette toile représentant le visage du Christ était le portrait d’un jeune homme juif travaillant dans l’atelier de Rembrandt et y ayant étudié la peinture, contre toutes les lois des religieux. 

Leonardo Padura fait ici un panorama de l’exercice de la liberté individuelle, du libre arbitre à travers diverses époques depuis Rembrandt dans l’Amsterdam du XVIIe siècle, décidant de représenter des individus et non des idées, puis le jeune juif qui ose désobéir au Consistoire et apprend à peindre, et décide ensuite de suivre un nouveau Messie, jusqu’à l’éclosion des tribus urbaines de La Havane où une jeune émo paye de sa vie l’exercice de sa liberté dans une société figée. 

Leonardo Padura écrit un livre magnifique et profond et se sert de son habileté d’auteur de roman noir pour nous amener, sous la houlette de son héros Mario Conde, à réfléchir sur ce que signifie notre libre arbitre.

Mon avis :

De l’auteur, j’avais beaucoup aimé L’homme qui aimait les chiens, sur l’assassin de Trotski. Ce roman-somme offrait de nouveau une perspective historique intéressante, je profitais donc de quelques jours de vacances pour me lancer dans sa lecture.

Je ne me rappelais pas que l’écriture de Padura était si ardue : des phrases longues, un rythme pas vraiment soutenu, des adjectifs incongrus. 

Mais quelle histoire que celle de ce bateau parti de Hambourg pour Cuba avec à son bord des centaines de juifs fuyant les persécutions nazis, et que quelques bureaucrates cubains avaient rançonnés avant leur départ pour obtenir un visa qui serait déclaré nul une fois le bateau dans le port de la Havane. Car avant la dictature communiste, il y avait une autre dictature libérale.

La seconde partie sur Rembrandt et son disciple juif ne m’a pas passionné du tout.

Quant à la troisième partie, elle éclaire d’un jour différent le propos de l’auteur sur la fameuse Hérésie : un choix, une division, une préférence. Mais j’ai trouvé la démonstration un peu longue.

L’image que je retiendrai :

Celle de Conde hésitant à offrir sa bague de fiançailles à Tamara.

Une citation :

 » Car, s’il est possible que même Dieu soit mort, en supposant qu’Il ait existé, et si on a aussi la certitude que tant de messies sont finalement devenus des manipulateurs, tout ce qui te reste, la seule chose qui en réalité t’appartient, c’est la liberté de choix. » (p.714)

Yv est beaucoup plus enthousiaste que moi.

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