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J’ai épousé un communiste – Philip ROTH

Le maccarthysme a beau déferler sur l’Amérique au tournant des années cinquante, Ira Ringold se croit à l’abri de la chasse aux sorcières. Non seulement parce que son appartenance au Parti communiste est ignorée même de ses amis, mais surtout parce que l’enfant des quartiers pauvres de Newark, l’ancien terrassier au lourd passé, s’est réinventé en Iron Linn, vedette de la radio, idéale réincarnation de Lincoln, et heureux époux de Eve Frame, ex-star du muet.

Mais c’est compter sans la pression du pouvoir, sans les aléas du désir et de la jalousie, sans la part d’ombre que cachent les êtres les plus chers.

Car si Ira a changé d’identité, Eve elle-même a quelque chose à cacher. Et lorsqu’une politique dévoyée contamine jusqu’à la sphère intime, les masques tombent et la trahison affecte, au-delà d’un couple, une société tout entière.

Ne reste alors aux témoins impuissants, le frère d’Ira et son disciple fervent, le jeune Nathan Zuckerman, qu’à garder en mémoire ces trajectoires brisées, avant enfin, au soir de leur vie, de faire toute la lumière sur une page infâme de l’Amérique.

J’ai aimé Ira, au prénom colérique prédestiné. Ira parti de rien, qui côtoie les plus hautes sphères de New-York et qui finira sa vie au bord d’un chemin à vendre des pierres.

J’ai eu pitié de sa femme Eve, sous l’emprise de sa fille Sylphide. Une mère qui fait tout pour sa fille qui ne le lui rend jamais.

Mais en refermant ce roman, je me suis posée la question : est-ce que Ira aimait vraiment Eve ? Aucun indice dans les nombreuses pages qui décrivent la vie d’Ira.

J’ai eu en horreur O’Day, le mentor d’Ira : trop froid, trop idéologue, trop déconnecté de la vraie vie.

Un roman sur le maccarthysme et ses dégâts.

Quelques citations :

L’homme qui m’a appris le premier à boxer avec un livre est revenu aujourd’hui démontrer comment on boxe avec la vieillesse.

Je me rendis compte que je n’avais jamais imaginé, et encore moins vu, un Blanc aussi à l’aise avec les Noirs, aussi naturel. « Ce que les gens prennent pour de la morosité et de la bêtise, chez eux, tu sais ce que c’est, Nathan ? C’est une carapace protectrice. »

Il parlait pour émousser le tranchant de ses désirs.

Quand on généralise la souffrance, on a le communisme. Quand on particularise la souffrance, on a la littérature.

L’image que je retiendrai :

Celle de la voilette d’Eve, qui fait son charme et sa particularité.

Lu sur Liselotte

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