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La fabrique de la terreur – Frédéric PAULIN

J’avais hâte de retrouver ce dernier volet de la Trilogie Benlazar, même si je me doutais que cela allait être macabre. Je n’ai pas été déçue.

Le récit s’ouvre pourtant pendant la révolution de jasmin de 2011, en Tunisie. Quelle belle fleur, le jasmin, quelle bonne odeur…. Mais le déclencheur de cette révolution a été l’auto-immolation d’un jeune homme. Nous sommes tout de suite dans le ton.

L’auteur nous promène de la Tunisie en 2011 à Paris en 2015, au mois de novembre, en passant par Lunel, Molenbeek, Raqqa et Kobané (j’en oublie certainement).

L’auteur zoom parfois sur un fait précis, approchant sa lorgnette sur un événement, puis dézoom pour revenir aux déroulements plus général. J’ai eu un peu de mal, en début de lecture avec les ellipses, mais cela permet de donner du rythme.

J’ai aimé que les acteurs du drame viennent expliquer pourquoi La guerre est une ruse, titre du premier volet (p.166)

J’ai aimé retrouver Benlazar, dans sa retraite en Haute-Loire qui s’inquiète pour sa fille, rêvant sans cesse d’un loup, et croyant deviner sa présence dans les bois autour de sa maison.

L’auteur explique que la fusion entre les RG et la DGSE a fait perdre 10 ans au Renseignement français. Certaines personnes « fichées S » à l’époque ont été rayé des listes lors de la fusion, et ont pu en toute sérénité continuer de préparer des attentats ou de recruter de la chair à canons pour Daesh.

J’ai été déçue du parcours de Simon, jeune homme en étude d’informatique et qui se radicalise, part en Syrie, se tait comme tout le monde devant les exactions commises, puis tente de revenir en France. Combien comme lui n’ont pas pris la mesure du Califat ?

J’ai été en colère avec Benlazar, qui avait compris avant tout le monde, mais qui n’a rien pu faire. impossible de faire bouger le mammouth des services français.

Une trilogie qui se clôt malheureusement en apothéose tragique.

Quelques citations :

C’est tout le paradoxe avec Daech, c’est de nous faire tuer quelqu’un qu’on ne déteste pas. (p.291)

Qui disait vrai (l’imam ou Daech) ? C’est plus simple de regarder une vidéo en mangeant des chips plutôt que de se déplacer à la mosquée qui était loin de chez moi. (p.292)

A propos de l’occident : Ils auraient pu nous aider quand il y a avait Saddam ou que Bachar était seul. Mais c’était il y a bien longtemps. Ils ont préféré la propriété privée. Maintenant, c’est fichu. (p.344)

L’image que je retiendrai :

Celle de la ville de Raqqa dont pas une pierre ne reste debout. Le jasmin va mettre du temps à repousser…

Agullo, 5 mars 2020, 343 pages

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