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La patience des traces – Jeanne BENAMEUR

Il n’est pas commun de trouver un personnage principal qui soit un psychanalyste. Le dernier roman de Jeanne BENAMEUR ose ce pari et réussi à merveille.

 

Simon est un psychanalyste qui vient de laisser partir son dernier patient. Il n’en prendra pas d’autre. Dire qu’il part à la retraite serait mentir car son métier continue de lui poser questions.

 

Il faut dire que Mathieu, son ami d’enfance lui revient sans cesse en mémoire, et on sent que Simon élude ces souvenirs.

 

Il se prend d’amitié pour une nouvelle consœur mais choisi tout de même de partir sur une envie subite suite à la cassure de son bol du matin. Son voyage l’entraînera au Japon, sur une petit île et chez un couple éprit de traditions.

 

J’ai aimé suivre Simon au Japon, découvrir des techniques ancestrales sur la coloration du tissu ou la réparation de la vaisselle (kintsugi).

 

J’ai aimé découvrir sa mère qui, une fois par an, sortait le costume de son mari décédé pour le faire aérer.

 

J’ai aimé cette patiente qui quitte brusquement sa thérapie suite à une phrase de Simon : « Pour cela, il va falloir faire du ménage ». Simon repensera souvent à elles.

 

J’ai aimé la symbolique de l’eau omniprésente, et Simon qui nage à côté d’une raie manta.

 

Une atmosphère de douceur, de calme et de simplicité se dégage de ces pages, comme pour nous rappeler qu’au-delà de la course folle de notre civilisation, il y a la vraie vie au fil de nos émotions et des saisons.

 

Des citations à foison :

 

C’est peut-être ça une analyse réussie après tout. Accepter, au plus profond de soi, qu’on est limité et que pourtant, il y a de l’infini. (p.18)

 

Tu vois, moi j’aimerais ça comme unique meuble si un jour j’ai une maison, une table où on fait tout, on mange, on travaille seul, on peut jouer aux échecs, lire, poser ses coudes et discuter avec des amis toute la nuit. Une maison, c’est une table, non ? (p.76)

 

Dans tout ce qui n’a pas été fait. (p.97)

 

La mort de Mathieu n’appartient qu’à Mathieu. Elle n’appartient ni à lui ni à Louise. On s’empare des actes qui nous font du mal. On croit, on voudrait, y avoir jouer le rôle principal, même si ça fait mal, juste pour ne pas être totalement impuissant face à ce qui arrive. (p.192)

 

Trouver l’élan qui fait prendre le risque de quitter son eau. L’élan qui rassemble tout. (p.196)

 

L’image que je retiendrai :

 

Celle de Simon, mettant à jour son traumatisme et l’acceptant.

 

Actes Sud, 5 janvier 2022, 208 pages

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