Les choses humaines – Karine TUIL
Le roman commence avec de longs chapitres qui présentent chacun des personnages en s’attardant sur Jean Farel, célèbre journaliste de plus de 60 ans mais toujours à l’antenne.
Son ancienne seconde femme, Claire, est une écrivaine féministe.
Leur fils Alexandre prépare son admission à Stanford et revient à Paris ou son père va recevoir la Légion d’honneur (ou un autre hochet de la République).
Après la réception à l’Elysée, Alexandre se rend à une fête avec la fille aînée de l’amant de sa mère. Lors de cette soirée, Mila boit du champagne, elle qui n’a pas l’habitude et Alexandre finit par la violer derrière une benne à ordure et récupérer sa petite culotte, enjeu d’un pari.
Mais Mila porte plainte et tout bascule.
Et c’est là que le roman met mal à l’aise : Alexandre ne regrette pas son acte. Ce qui le gène, c’est d’être incarcéré et de ne pouvoir se rendre à son entretient pour Stanford. Pour lui, ce qu’il a fait est normal.
Sa mère, féministe engagée, prend tout de même le parti de son fils.
Jean, le père croit à un complot pour le faire virer de la chaîne, et va même jusqu’à avoir des propos outranciers lors du procès de son fils.
Car ce que démontre le procès, c’est que c’est la victime Mila qui est accusée : est-ce qu’elle ment ? Pourquoi ne s’est-elle pas défendue ? Ses moindres gestes après son viol sont suspects.
En revanche, tout ce qu’a fait Alexandre est parfaitement normal et le reflet des comportements des jeunes qui regardent tous des vidéos pornos et trouvent normal de dire à une jeune fille qu’il ne connait pas : « Suce-moi, salope ». Révoltant !
Un roman qui analyse la procédure pénal et la société contemporaine où tout le monde avale du Xanax comme des bonbons pour rester performant et surtout ne pas penser aux conséquences de ses actes.
Une lecture qui m’a parfois révoltée devant le désarroi de Mila, qui avant d’être violée et condamnée n’a pas eu de procès.
Un grand roman malheureusement basé sur des faits réels.
Et puis un roman qui s’ouvre sur une citation de Bernanos ne pouvait que me plaire.
L’image que je retiendrai :
Alors qu’Alexandre rentre dormir chez sa mère après le viol, Mila se rend à la police puis à l’hôpital avec sa mère où elle subit des tonnes d’examens et avale des tas de pilules (du lendemain, contre le VIH et le MST)
Quelques citations :
Qui cherche la vérité de l’homme doit s’emparer de sa douleur. Georges BERNANOS in La joie
C’est même comme ça qu’on sait qu’on est vivant : on se trompe. Philipp ROTH in La pastorale américaine
La maladie est une zone d’ombre de la vie, un territoire auquel il coûte cher d’appartenir. En naissant, nous acquérons une double nationalité qui relève du royaume des bien portants comme de celui des malades. Et bien que nous préférions tous présenter le bon passeport, le jour vient où chacun de nous ets contraint, ne serait-ce qu’un court moment, de se reconnaître de l’autre contrée. » Susan SONTAG in La Maladie comme métaphore
Elles étaient trois femmes d’une même génération, promises à un destin enviable, et les trois avaient été entravées, affaiblies, à des moments différents de leurs vies, à cause de la captation prédatrice des hommes en qui elles avaient confiance. (p.248)
Gallimard, 22 août 2019, 352 pages
30 commentaires
Eve-Yeshé
j’ai beaucoup aimé « L’insouciance » de Karine Tuil…
le thème de celui-ci me tente moins … on verra plus tard 🙂
Alex-Mot-a-Mots
J’ai adoré ce roman.
Florinette
J’avais lu et entendu pas mal d’éloges sur cet auteur et à ce que je lis, toi aussi tu as apprécié sa plume !
Beau dimanche Alex, bisous
Alex-Mot-a-Mots
C’est la première fois que je le lis, et j’ai beaucoup aimé.
Violette
j’ai toujours et encore L’insouciance qui m’attend dans ma PAL… Ce roman-là t’a chamboulée, dis donc!
Alex-Mot-a-Mots
Premier roman que je lis de cette auteure, et j’ai vraiment accroché.
aifelle
Ils se sont un peu écharpés hier soir au Masque et la Plume sur ce titre. Il ne m’attire pas trop et c’est un sujet qui me met tellement en colère que j’évite de lire dessus.
Alex-Mot-a-Mots
Alors ce roman n’est pas pour toi.
Matatoune
C’est mon prochain après le nouveau Benameur que je commence ! C’est la première chronique que je lis ! Avis mitigé, donc ! A voir…
Alex-Mot-a-Mots
Une lecture plutôt plaisante.
Matatoune
Non, je rectifie ! Je viens de te relire ! Un livre aimé ! Te prie de m’en excuser ! Bonne journée !
Alex-Mot-a-Mots
Pas de soucis.
keisha
Bon, pas prioritaire, ça me mettrait en colère!
Alex-Mot-a-Mots
Ce serait dommage….
Syl.
Un sujet de notre société, si présent ! J’espère qu’il y a justice à la fin…
Alex-Mot-a-Mots
Je n’en dirai rien !
aleslire
Je lirai plutôt le premier de cette auteure pour la découvrir, je crains que le propos de ce titre ne me mette en une sacrée rogne !
Alex-Mot-a-Mots
Je découvre l’auteure avec ce titre. J’en lirai d’autres.
Mimi
Un sujet très actuel où le sens de la « normalité » peine à retrouver sa place. Pauvre Mila qui doit se battre pour prouver son innocence…
Alex-Mot-a-Mots
J’ai souffert avec elle.
mesechappeeslivresques
une auteure que je n’ai encore jamais lu mais que je suis curieuse de découvrir
Alex-Mot-a-Mots
C’est le premier que je lis de cette auteure, et j’ai adoré. Un sujet fort.
mespagesversicolores
Outch le sujet m’a l’air fort et je ne suis pas sûre d’adhérer aux propos.
Alex-Mot-a-Mots
Un sujet fort, en effet. Mais écrit magistralement.
Laure Micmelo
Ce livre est absolument brillant !
Alex-Mot-a-Mots
Exactement !
dasola
Bonsoir Alex, on parle beaucoup de ce roman et j’avoue qu’il ne me tente pas du tout. Le sujet est brûlant mais pas pour moi. Bonne soirée.
Alex-Mot-a-Mots
Ca arrive aussi. Je comprends ta décision.
Taylor
roman dans ma PAL. A suivre donc
Alex-Mot-a-Mots
J’attends maintenant ton avis.