Auteurs en L

Quand tu écouteras cette chanson – Lola LAFON

Il y a quelques années, en faisant la queue en attendant d’entrer dans le musée Anne Frank, trois jeunes filles effectuaient un sondage pour savoir qui, dans cette queue, avait lu le livre de la jeune fille. Autour de moi, j’étais la seule. Certains en avaient entendu parler, d’autres étaient là parce que c’était un lieu à visiter dans la ville.

Lola LAFON sait, avant de passer la nuit dans le musée, qui est la jeune fille et a lu son livre, et d’autres écrits d’études autour de ce livre.

J’ai aimé que l’auteure parle du vide, de l’absence et de ses traces.

J’ai moins apprécié les différentes citations de divers auteurs, toutes à juste propos, mais un peu trop nombreuses à mon goût, comme si l’auteure elle-même n’arrivait pas à dire aussi bien que d’autres auteurs.

J’ai aimé sa mise en miroir avec son histoire familiale : sa mère juive cachée pendant la guerre, son identité juive parfois cachée.

J’ai aimé son regard sur la grande soeur d’Anne, Margot, qui écrivait aussi un journal qui n’a jamais été retrouvé. Margot dont on ne parle pas, la fille la plus oubliée de la famille.

J’ai aimé son discours sur la danse classique : « Elle était là ma religion, elle sentait la colophane et la sueur. Je l’avais trouvée ma terre : on y souffrait, on s’y taisait. » (p.47)

J’ai été étonnée de découvrir qu’Anne avait retravaillé son texte, que de son premier jet de journal intime, elle l’avait adressé à Kitty pour prendre de la distance.

La fin m’a étonnée, plus universelle.

Quelques citations :

J’adopte un ton détaché, je parle de mon travail, des jeunes filles qui sont au oceur de mes romans : toutes se confrontent à l’espace qu’on leur autorise. Toutes, aussi, ont vu leurs propos réinterprétés, réécrits par des adultes. (p.14)

Naître après, c’est vivre en dette perpétuelle. Chaque enfant sera un miracle. Il aura le devoir d’être sur-vivant. Elle laisse sans voix, sans possibilité de s’y mesurer (p.43)

On leur opposera le mutisme. Parce qu’on ne pourra pas dire qu’au contraire, en frôlant la mort, on clame qu’on l’a vaincue. (p.170)

« … ces filles qui se laissent mourir ont une raison commune et secrète, qu’elles cherchent à savoir où est la vie et où est la mort, à cause de quelque chose qu’il fallait leur dire, qu’on n’a pas pu leur dire, quelque chose qui leur fait peur » écrit par Geneviève Brisac dans le roman Petite. (p.170)

L’image que je retiendrai :

Celle des images omniprésentes, comme si il fallait trouver sur les photos une présence qui se dérobe.

Stock, 17 août 2022, 180 pages

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