Un livre de martyrs américains – Joyce Carol OATES
De l’auteure, j’aime ou déteste les romans. Celui-ci me laisse une impression mitigée.
Pourquoi autant de pages (859) pour en arriver à une telle fin gentillette et presque impossible ?
Loin de moi l’idée de vous décourager de lire ce pavé déstabilisant.
Car ce qui est intéressant dans ce roman fleuve, c’est que l’auteure ne prend pas partie entre deux engagements, l’un pour l’avortement, l’autre contre.
D’une part Luther Dunphy, endoctriné par son église de Jésus de Saint-Paul, qui lutte contre l’avortement au point de tuer un médecin avorteur.
En parallèle, la famille du médecin tué, et surtout sa seconde fille Naomi, qui perd pied quelques années après la mort de son père et avant que sa grand-mère de New-York ne la prenne sous son aile.
Nous suivons surtout les vies de Naomi et de Dawn Dunphy, leur fille respective. L’une deviendra documentariste et l’autre boxeuse professionnelle. Les deux cherchant le père de façon différente.
J’ai été gênée, lorsque les chapitres parlent de la famille Dunphy, de lire et relire jusqu’à la nausée que les bébés avortés étaient vivant et n’avait rien demandé. Comme un leitmotiv enfoncé dans le crane au marteau-pilon.
J’ai eu pitié de Dawn, qui devient DD Dunphy, le marteau de Jésus, cherchant dans la boxe un exutoire pour toute la violence qu’elle ressent suite à la mort de son père. Elle qui commence un sport devenu l’apannage de noirs et des hispaniques américains, elle la petite blanche désargentée et sans formation.
J’ai eu pitié de Jenna, la femme du médecin, qui disparait de la vie de ses enfants car elle ne peut pas faire face à la mort de son mari.
Naomi m’a paru plus énigmatique, sans réelle volonté, commençant un travail de recherche sur son père mais ne le terminant pas.
Deux Amériques se font face : celle de petits blancs sans éducation qui cherchent et trouvent un sens à leu vie dans la religion jusqu’à l’excès ; celle de la bourgeoisie blanche qui s’engage pour une cause au mépris de sa propre sécurité et de celle de sa famille.
Une conclusion bien plate : bien sûr que ces deux hommes étaient suicidaires, mais ils ont laissé à un autre le soin de les tuer. Ils ont tous deux laissés une famille en morceaux derrière eux.
Quelques citations :
Que cela tienne à ses croyances religieuses, ou à Luther Dunphy lui-même, il en avait après les « subventions fédérales » et « l’aide sociale »… après « l’Etat socialiste » qui était un « Etat athée impie ».
Et Luther n’avais pas confiance dans les hôpitaux, lui non plus. Ils n’avaient pas confiance en grand-chose, à part leur église – et pas n’importe quelle église, seulement la leur. (Qui apprenait à ses fidèles à se méfier des autres églises chrétiennes).
Ce ne sont pas les femmes qui prennent l’initiative d’une plainte, mais quelqu’un qui se sert d’elles : suivez la trace du sperme. Celui qui les féconde est généralement celui qui se sert d’elles.
Qu’il y avait une guerre religieuse aux Etats-Unis pour le coeur et l’esprit des citoyens… des électeurs. Qu’il y a une guerre. Et dans une guerre, des innocents périssent.
De même que les politiciens de droite se faisant populiste pour attirer les votes, ils étaient financés par des sociétés prospères, uniquement préoccupées de faire élire des gouvernements favorables aux affaires.
Elle est incroyable ! Elle n’admettra jamais, pas un instant, avoir commis une faute.
L’image que je retiendrai :
Celle des nombreuses mouches qui parsèment le récit régulièrement. Un parfum de putréfaction dans ces pages ?
Lu sur Liselotte
Challenge Pavévasion de Brize
30 commentaires
mesechappeeslivresques
Toujours pas lu ce pavé. Malgré ton ressenti en demi-teinte, je reste curieuse de le découvrir.
Alex-Mot-a-Mots
Il faut se lancer…
Ingannmic
Je n’avais lu jusqu’à présent que des avis très élogieux, qui m’ont vraiment donné envie de le lire. Tu me refroidis un peu, d’autant plus que comme toi, ma « relation » avec Oates est assez mouvementée, passant de coups de cœur à grosses déceptions…
Alex-Mot-a-Mots
Celui-ci est intéressant car je ressors de ma lecture mitigée.
krol
J’ai très envie de le lire malgré ton ressenti. Je connais très peu Oates. Je n’en ai lu qu’un me semble-t-il, pas suffisant pour se faire une idée.
Alex-Mot-a-Mots
J’espère qu’il croisera ta route et que tu l’apprécieras plus que moi.
aifelle
Je n’ai pas très envie de me lancer dans cette lecture-là, surtout que c’est un pavé ..
Alex-Mot-a-Mots
L’été est idéal pour cela, pourtant…
keisha
Les mouches? Je ne me souviens pas.
Bon, des longueurs là dedans, mais je suis arrivée au bout, ce qui représente déjà beaucoup, parce que Oates et moi, ça passe rarement.
Alex-Mot-a-Mots
J’avais adoré Les chutes. Plus court.
Philisine Cave
Comme tu le sais, les pavés et moi, cela fait deux (enfin, il faut de bons gros arguments pour que je me lance dedans). Oates m’intrigue fortement : elle ne me laisse jamais mais absolument jamais indifférente et je trouve que c’est une grande qualité. Là sur ce roman-ci, tes freins freinent ma motivation à le découvrir.
Alex-Mot-a-Mots
Etrangement, je suis mi-figue mi-raisin avec ce livre-ci de l’auteure.
Eve-Yeshé
il est dans ma PAL mais j’hésite toujours à cause du thème bien-sûr! le côté pavé me freine rarement…
j’ai bien aimé « Nous étions les Mulwaney », renâclé un peu avec « Je vous emmène »…
j’en ai d’autres dans ma PAL « Mudwoman », « La fille du fossoyeur » entre autres 🙂
Alex-Mot-a-Mots
J’avais adoré Les chutes mais abandonné Blonde. C’est le troisième que je lis de l’auteure.
manou
Je n’ai pas trop envie de me lancer dans un pavé pareil en ce moment, trop de passages à la maison et pas assez de suivi dans mes lectures sans être interrompue…Merci pour ton avis
Alex-Mot-a-Mots
C’est bien aussi de profiter de sa famille et des amis.
mespagesversicolores
Je suis de celles qui ont aimé ce livre 😀
J’ai tout aimé, ses pages, ses personnages, sa conclusion (mais je comprends ton ressenti face à elle)..
Alex-Mot-a-Mots
La conclusion m’a paru un peu fade, il est vrai.
coupsdecoeurgeraldine
Je n’ai encore rien lu de cette romancière… Mais manifestement, ce n’est pas via ce titre que je ferai sa rencontre !
Alex-Mot-a-Mots
Tu as raison, il vaut mieux commencer par des ouvrages plus courts.
titoulematou
je suis comme vous: soit j’aime dès les premières pages, soit je déteste et je laisse tomber au bout de quelques pages … donc maintenant je prends à la médiathèque … Pour celui la on verra à la rentrée …
sur le thème de l’avortement vu sous plusieurs angles, j’avais bien aimé :
https://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature-etrangere/une-etincelle-de-vie
Alex-Mot-a-Mots
Un pavé qui demande du temps. Tu as raison de l’emprunter à ta BM.
Florinette
J’aime beaucoup cette auteure, mais ton ressenti me donne pas très envie de m’y intéresser davantage.
Belle semaine Alex, bisous
Alex-Mot-a-Mots
Il ne m’a en effet pas pleinement convaincu.
Une Comète
Moi j’adore Oates, vraiment, je l’aime d’amour. Je n’ai pas lu ce roman là mais je crois qu’il est trop long ce n’est pas le moment pour moi. J’ai besoin de lecture qui m’aèrent. Je lis ses nouvelles !!!
Alex-Mot-a-Mots
C’est en effet un pavé. Mais si tu te décides à le lire un jour, je serai curieuse d’avoir ton avis.
Karine:)
Attends, JC Oates avec une fin gentillette?!?! Je n’y crois pas!
Alex-Mot-a-Mots
Et pourtant….
elea1688
Au vu de ton ressenti, et du nombre de pages 😉 il ne sera pas prioritaire dans mes lectures. J’ai d’autres romans de l’auteur à lire avant.
Alex-Mot-a-Mots
J’ai attendu cet été pour le lire, au vue du nombres de pages.